12 novembre 1964. Judia, une personne ayant un déficit mental âgée de 22 ans a accouché d’une fille. Elle a pu accoucher grâce à un voisin qui était présumé père de l’enfant. Baptisée Georgina, la fillette a été admise d’urgence à la Pouponnière de Saint-Denis. Sa mère a été internée à l’hospice de Bois d’Olives de manière définitive. Judia sera confiée à la Direction départementale de l’action sanitaire et sociale (DASS) par ordonnance du 11 mai 1965. Le père est décédé et la mère également. Il n’existe aucune famille proche susceptible de recevoir la fille à la Chaloupe, même pas son parrain et sa marraine. Cette famille est connue du service social depuis 1959. Le père a effectué un long séjour au sanatorium. Un fils âgé de 16 ans est à l’hospice de Bois d’Olives, faible mentalement.
Georgina symbolise la misère psychologique qui se conjugue avec la misère « intellectuelle ». Son histoire est la matérialisation de ces enfants pris en charge par la DASS, créée par un décret du 30 juillet 1964. Les DASS prendront le nom de Directions départementales des affaires sanitaires et sociales en avril 1977. L’environnement familial et social pèse parfois de tout son poids sur le psychisme des mineurs.
« A La Réunion comme ailleurs, pour élever des enfants il faut une stabilité et un minimum de moyens. Mais, ces derniers ne peuvent pas tout. L’équilibre psychologique d’un enfant ne réside-t-il pas dans la qualité des relations intra-familiales et une claire conscience des responsabilités de chacun ? » interrogent Philippe Vitale, Wilfrid Bertile, Prosper Eve et Gilles Gauvin, membres d’une commission temporaire d’information et de recherche historique dans un rapport intitulé Étude de la transplantation de mineurs de La Réunion en France hexagonale.