Les chambres régionales des comptes de La Réunion et de Mayotte, en collaboration avec la Cour des comptes, ont récemment dévoilé un rapport approfondi sur l’état de l’enseignement supérieur et de la recherche dans les Outre-mer. Cette enquête, réalisée avec d’autres chambres territoriales, met en lumière les défis auxquels ces territoires sont confrontés, notamment en matière de formation des étudiants et de recherche scientifique.
Une réalité complexe pour les territoires d’Outre-mer
Malgré leur diversité juridique, démographique, culturelle et économique, les régions d’Outre-mer partagent des problématiques communes. Les taux de chômage et de pauvreté y sont systématiquement plus élevés qu’en métropole. Dans ce contexte, la formation des jeunes générations et le développement d’une recherche de haut niveau sont essentiels pour favoriser le développement local et offrir de nouvelles perspectives socio-économiques.
Entre 2002 et 2023, le nombre d’étudiants dans ces régions a augmenté de 54 %, passant de 39 570 à 60 917. Cette hausse témoigne d’un intérêt croissant pour l’enseignement supérieur, mais elle met également en exergue les défis à relever pour répondre à ces besoins. La recherche, quant à elle, bénéficie de la présence d’importants organismes nationaux comme le CNRS, l’Inserm, Météo-France, l’INRaé, l’IRD, Ifremer, le Cirad, le CNES et le BRGM, qui contribuent activement à l’avancement des connaissances dans divers domaines.
Les spécificités de La Réunion : des atouts et des fragilités
À La Réunion, l’offre de formation est particulièrement diversifiée, portée par une université pluridisciplinaire, un centre hospitalier universitaire, des sections de technicien supérieur, ainsi qu’une école d’architecture et une école d’ingénieurs. Cependant, cette diversité n’est pas toujours bien coordonnée avec les besoins du territoire. Le schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (SRESRI), prévu pour fin 2024, devrait permettre d’optimiser cette coordination pour mieux répondre aux besoins locaux en matière de compétences.
Le soutien à la vie étudiante est un autre enjeu majeur, notamment en termes d’accès au logement. À La Réunion, 62,7 % des étudiants sont boursiers, ce qui souligne l’importance de politiques publiques ciblées pour améliorer leur qualité de vie.
Une gouvernance universitaire en crise
Le rapport souligne des difficultés majeures dans le pilotage de l’Université de La Réunion. En 2023, des dysfonctionnements internes ont conduit à la suspension du président de l’université, suivie par la mise en place d’une administration provisoire en mars 2024. Cette situation exceptionnelle a révélé une gouvernance défaillante, avec un manque d’accompagnement de la tutelle et une structuration des services jugée opaque. De plus, le dialogue social semble inexistant, rendant difficile toute prise de décision concertée.
Le pilotage inefficace a également des répercussions sur la gestion des ressources humaines. Des chantiers stratégiques, pourtant identifiés, peinent à avancer en raison de la faiblesse du dialogue interne et de la gouvernance. En conséquence, la situation financière de l’établissement s’est nettement dégradée depuis 2020, avec une gestion comptable jugée fragile.
Sept recommandations pour un avenir plus solide
Face à ces constats, les chambres régionales des comptes formulent sept recommandations pour améliorer la situation :
- Renforcer la gouvernance de l’université avec un accompagnement accru des autorités de tutelle.
- Améliorer la structuration des services pour une gestion plus efficiente.
- Favoriser un dialogue social constructif afin de créer un environnement propice à la coopération.
- Mettre en place des outils de pilotage prévisionnels pour une meilleure gestion des ressources humaines.
- Optimiser la coordination entre l’université et les autres acteurs du territoire pour mieux adapter l’offre de formation aux besoins locaux.
- Soutenir la vie étudiante, notamment en matière de logement, pour réduire les inégalités.
- Stabiliser la situation financière de l’établissement par une gestion plus rigoureuse et prévisionnelle.
Perspectives pour l’enseignement supérieur et la recherche à Mayotte
Le rapport met également en lumière la situation à Mayotte, où l’université fait face à des défis similaires, bien que le contexte local diffère de celui de La Réunion. Ici, l’enseignement supérieur est crucial pour le développement socio-économique, d’autant plus que l’île est confrontée à des taux de natalité et de chômage particulièrement élevés.
La mise en œuvre d’une stratégie plus cohérente pour l’allocation des ressources et le soutien à la recherche est essentielle pour que ces territoires puissent relever les défis à venir et assurer un avenir meilleur à leurs jeunes générations.