A l’occasion de la 2ème marche pour la lutte contre l’endométriose, qui se déroulera ce
Samedi 24 Mars à Saint-Denis au Barachois.
Madame Gouhali la Présidente de l’association « Mon Endométriose, Ma souffrance », qui est aussi l’organisatrice de cette marche a accepté de m’accorder une interview.
Cette dernière aura pour sujet l’Endométriose et ses différents impacts, une maladie dont elle a souffert depuis de nombreuses années et qu’elle a vécu sur différents facteurs de sa vie.
Souffrant moi aussi de ce mal mais d’une autre manière je tiens également à partager avec vous mon parcours face à la maladie afin de faire voir qu’il n’y a pas qu’une seule forme d’atteinte d’Endométriose.
A quel âge avez-vous ressenti les premières douleurs ?
Madame Gouhali : C’est à partir de l’âge de 15 ans avec des règles très très douloureuses, voire insupportables. Et c’était des règles hémorragiques.
Mademoiselle Lesquelin : Je n’ai jamais eu de douleurs de règles, cependant, à l’âge de 18 ans mes jambes m’ont brutalement lâchées. Et à 23 ans, j’ai eu ma première douleur dans le bas du ventre.
Comment a réagi votre entourage proche face à vos douleurs incessantes ?
Madame Gouhali : Face à mes allers-retours à l’hôpital et l’absence de diagnostique, si ce n’est la supposition d’un éventuel kyste, mon entourage proche avait peur. Mais, il y avait aussi quelques amis qui disaient que je simulais.
Mademoiselle Lesquelin : En ce qui me concerne, comme mes douleurs sont apparues du jour au lendemain, j’ai dû faire face à l’incompréhension et à la moquerie de la part de mes proches. Lorsque j’étais en crise, j’entendais dire : « c’est pas possible, tu ne peux pas avoir aussi mal, n’importe quoi… » ou encore « t’inquiètes pas ! bientôt , tu vas accoucher » (sachant que je n’avais personne dans ma vie).
Combien d’années avez-vous souffert avant d’être diagnostiquée ?
Madame Gouhali : J’ai été diagnostiquée au bout de 6 à 8 ans après les premiers symptômes d’une Endométriose de Stade 4.
Mademoiselle Lesquelin : Le diagnostic est tombé au bout de 7 ans pour l’Endométriose et pour l’Adénomyose ou Endométriose interne profonde au bout de 9 ans de douleurs chroniques.
Quelle a été votre première réaction, face à l’annonce du diagnostic ?
Madame Gouhali : J’ai été soulagée car, j’ai su enfin de quoi je souffrais, sans réaliser le véritable impact de cette maladie dans ma vie. Mais, je l’ai compris très rapidement lorsqu’on m’a expliqué que vu le stade où j’en étais, je ne pouvais pas forcément avoir d’enfant. Si, je voulais en avoir un, il fallait essayer le plutôt possible car j’avais beaucoup d’atteintes digestives et très vite beaucoup d’autres complications se sont ajoutées.
Mademoiselle Lesquelin : Suite à l’annonce du diagnostic d’Endométriose, j’étais à la fois soulagée de savoir que je n’étais pas « folle » et effondrée car lorsque l’on avait suspecté cette maladie, j’avais commencé à faire des recherches.
A l’annonce du diagnostic avez-vous réussi à en parler facilement à votre entourage ?
Madame Gouhali : Je n’ai jamais eu de réels tabous concernant mes douleurs, mais, le plus compliqué pour moi c’était d’expliquer ce qu’est l’Endométriose car ce n’est pas une maladie dont on entend souvent parler comme le cancer ou le diabète. Cependant, malgré qu’elle touche 1 femme sur 10, elle reste très très mal connue.
Mademoiselle Lesquelin : Ma mère m’a accompagné chez le spécialiste suite à ma première cœlioscopie, c’est alors qu’il nous a annoncé à toutes les deux, le mal dont je souffrais. Ensuite, nous avons posé des questions concernant la maladie afin de savoir un peu plus à quoi s’attendre et pouvoir rassurer mon père. Cependant, face à l’incompréhension et l’ignorance sur mes douleurs, la famille proche m’a complètement mise de côté car pour eux j’étais « folle ».
Selon vous, peut-on parler d’une « maladie de couple » ?
Madame Gouhali : Oui c’est une « maladie de couple ». En effet, la maladie n’impacte pas que sur la personne atteinte mais, aussi sur son entourage, dont le couple, car le premier signe c’est l’infertilité. C’est une maladie qui peut très bien détruire la vie de couple, car elle touche à l’intimité. En effet, on est exposé à des examens pour aller vers les fécondations in vitro qui est une éventuelle solution pour avoir un enfant. Mais, c’est aussi beaucoup demander au conjoint. Ce dernier va supporter les examens et nos humeurs, car pendant la PMA ça joue sur la psychologique et la prise de poids et heureusement pour certaines femmes le bonheur est à la clé. Mais pour d’autres, il faudra faire face au deuil du couple face au non à la présence d’un enfant.
Mademoiselle Lesquelin : Oui malheureusement, c’est une « maladie de couple », car cela était très compliqué pour moi au tout début de mon histoire avec mon copain et jusqu’à aujourd’hui de lui expliquer mes douleurs en bas du dos et du ventre, ma fatigue chronique, mes sauts d’humeur mais aussi les douleurs morales face à mes douleurs pendant nos moments intimes. Pour ce qui est de l’essai bébé, on nous a d’ores et déjà annoncé que lorsque je serais enceinte, je devrais restée allongée pendant la durée de la grossesse à cause de mon atteinte à la vessie.
Quels ont été les impacts de la maladie et de ses symptômes sur votre couple ?
Madame Gouhali : Je suis actuellement avec quelqu’un qui ne connaissait pas la maladie en amont et à qui j’ai dû expliquer que je ne suis pas une « femme comme les autres » et donc il fallait lui expliquer que j’ai beaucoup de soucis de santé et notamment des soucis intimes. Et, ça se passe très bien il a entièrement compris.
Mademoiselle Lesquelin : Malgré le jeune âge de mon couple, bien que mon copain comprend plus ou moins ce que je traverse. Notre vie intime est complètement perturbée car j’avais honte au début de notre relation de lui avouer que j’étais « différente ». Notre jeune couple a du mal à décoller car à cause de cette maladie je suis parfois totalement renfermée sur moi-même et je rejette son amour même si c’est l’un des seuls remèdes face à cela.
Avez-vous réussi à maintenir une vie professionnelle « normale »? Quelles sont les difficultés particulières que vous avez rencontrées sur ce plan au sein de votre parcours de maladie ?
Madame Gouhali : Oui, j’ai réussi à la maintenir, cependant, après ma chirurgie radicale j’ai pris du temps à retrouver du travail car le suivi post opératoire était long, j’ai eu une paralysie de la vessie, des difficultés au niveau des selles, également le temps de la rééducation.
Je suis maintenant en fonction depuis 2 ans dans un poste très épanouissant, pourtant, je jongle avec mon état de santé et il y a des jours où mon physique est plus présent que d’autres, mais j’arrive à gérer un peu mieux mon corps.
Et depuis la chirurgie radicale, mes douleurs ne sont plus les mêmes, malgré un suivi post opératoire quand même lourd, mais, cependant je n’ai plus les douleurs invalidantes de l’Endo d’avant.
Mes collègues comprennent lorsqu’il y a des douleurs, j’ai de la chance d’avoir une équipe qui comprend au sein de l’association, on nous remonte souvent que les douleurs sont très mal perçues car se sont des arrêts de travail à répétition. Les gens ont du mal à comprendre que l’endométriose puisse faire mal au point de ne pas venir travailler. D’où, le combat de l’association de faire reconnaître la maladie comme une « Affection à Longue Durée » et aussi qu’on reconnaisse que les douleurs sont invalidantes.
Mademoiselle Lesquelin : Lors de ma première expérience professionnelle, j’ai eu à faire face à deux sortes de réactions étroitement la moquerie et l’ignorance. Cependant, à force de me voir souffrir certaines personnes ont commencé à se lasser de mes absences donc, ont essayé de comprendre pourquoi je suis comme ça, à l’époque je n’avais toujours pas de diagnostic.
Aujourd’hui au Journal.re on m’a accordé la confiance malgré mes douleurs incessantes qui ne m’empêche pas d’être productive, vu que je suis la seule à gérer mon planning car je travaille à domicile.
En conclusion : Madame Gouhali et moi même, on s’accorde à dire que notre combat face à cette maladie, nous a permis de comprendre qu’il ne faut jamais s’arrêter à un premier diagnostic. Et que face à celui-ci, il ne faut jamais cessé de se battre afin d’être écoutée et de trouver le bon nom donné à nos douleurs afin de pouvoir se procurer les bons suivis et les bons traitements médicaux adaptés à chacune d’entre nous.
Crédit photo : Patricia W