Antananarivo, 24 avril 2025 – En appelant à l’intégration de Mayotte dans la Commission de l’océan Indien (COI), Emmanuel Macron a ravivé un débat aussi ancien que sensible dans la région. Lors de son discours au cinquième sommet de la COI, le président français a plaidé pour une approche « pragmatique » afin de permettre au département français d’outre-mer de bénéficier des programmes régionaux, malgré l’opposition persistante des Comores.
« Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l’écart d’un certain nombre de nos programmes », a-t-il déclaré, insistant sur l’importance d’une coopération inclusive face aux défis partagés de l’océan Indien.
Une déclaration qui divise
Sur les réseaux sociaux, les réactions ne se sont pas fait attendre. De nombreux internautes ont dénoncé ce qu’ils considèrent comme une nouvelle manifestation de “colonisation moderne”, critiquant la France pour son ingérence persistante dans la région.
« Que la France s’occupe de ses problèmes. Les Comores appartiennent aux Comoriens, un point c’est tout », a commenté un internaute, résumant une opinion largement partagée côté comorien. D’autres dénoncent une stratégie diplomatique néocoloniale, s’interrogeant sur la légitimité de la France à plaider pour l’inclusion d’un territoire contesté.
Mais à Mayotte, l’exclusion de la COI est vécue comme une injustice. Des voix locales s’élèvent, comme celle de Laurent De Mayotte :
« Tout citoyen de la zone sud de l’océan Indien peut solliciter l’aide de la COI, sauf les habitants de Mayotte. Vous trouvez ça normal ? »
Une hypocrisie régionale ?
Au-delà du bras de fer entre Paris et Moroni, certains pointent aussi les contradictions d’autres États membres de la COI, notamment Maurice. « La position mauricienne est ambiguë : elle refuse de reconnaître Mayotte comme département français, mais ses entreprises répondent aux appels d’offre de ses administrations », dénonce un autre commentaire. Un double discours qui interroge sur les véritables logiques géopolitiques à l’œuvre.
Une coopération régionale sous tension
La France reste pourtant le premier bailleur de la COI, via l’Agence française de développement (AFD), qui finance pour 125 millions d’euros de projets. Pour Emmanuel Macron, il est temps que Mayotte participe pleinement à ces efforts de coopération, notamment sur les volets maritime, alimentaire et sanitaire.
« Aucune de nos îles ne peut relever seule les défis de demain », a-t-il insisté, évoquant la nécessité d’un front commun face aux enjeux du changement climatique, de la sécurité et de la souveraineté alimentaire.
Une ligne fragile
Entre accusations d’ingérence, revendications de souveraineté, et appels à l’inclusion, l’annonce de Macron réactive un contentieux historique sans apporter de solution immédiate. Il mise sur une progression par étapes, sans exigence de reconnaissance immédiate, espérant ainsi contourner les blocages diplomatiques.Mais la route vers une intégration de Mayotte à la COI semble semée d’obstacles : identité, mémoire, légitimité politique et intérêts économiques s’entremêlent dans un dossier explosif, où chaque mot pèse lourd.