La pièce Domoun , mise en scène par Sergio Grondin et sa compagnie Karanbolaz, aborde un sujet sensible : l’exode forcé de plus de deux mille enfants réunionnais vers la métropole française, de 1962 à 1987, sous l’impulsion du député Michel Debré. Ce transfert, justifié par la volonté de prévenir une crise sociale à La Réunion, a marqué des familles entières, laissant des traumatismes profonds chez ces enfants déplacés de force.

Le déplacement des “Enfants de la Creuse” est une page sombre de l’histoire française. Avec l’accord des autorités et des services sociaux, de jeunes Réunionnais ont été envoyés dans des départements ruraux comme la Creuse, où beaucoup ont vécu des expériences douloureuses. Loin de leurs racines et de leur culture, ils ont été confrontés à l’isolement, aux abus, et à l’absence de repères familiaux.

Grondin mêle ici histoire collective et mémoire personnelle. Il réunit les témoignages de ces anciens “zanfan-bandoné” (enfants abandonnés), créant un parallèle avec les drames familiaux et identitaires qu’il a lui-même vécus. Domoun interroge les moyens de se reconstruire malgré ces blessures d’enfance. Comment un individu, face à l’abandon, peut-il se retrouver et devenir une “domoun” (personne complice) ?

La pièce Domoun n’est pas un simple récit historique ; elle est un plaidoyer pour la dignité des victimes, longtemps oubliées. Grondin invite le public à réfléchir sur les répercussions de cet exil forcé et sur la nécessité de reconnaître cette partie d’histoire pour mieux comprendre ses effets.

Sans effet superflu, Domoun repose sur une mise en scène directe et des témoignages authentiques. La sobriété des éléments scéniques amplifie l’impact émotionnel de chaque mot et geste, soulignant la gravité du sujet sans excès.